22 juin 2008

La Croisette… voie sans issue ?

D'année en année, la Croisette devient une impasse, l' impasse de l'article 26 !

Dès 1995, une réfection et l'aménagement des espaces verts s'imposaient. Cet environnement peu attractif ayant des répercussions désastreuses sur l'activité économique, l'AFU décidait de faire appel à un consultant, le CABINET DETENTE, pour faire le point et créer un cadre de vie destiné à sortir les commerces de leur léthargie. En 1996 le CABINET DETENTE déposait son rapport, les points négatifs relevés étaient les mêmes qu'aujourd'hui, si ce n'est qu'ils ont subi un phénomène d'aggravation : envahissement des parties communes, espace trop important accordé à l'automobile et aucune place pour les piétons. Ce rapport, pourtant exclusivement destiné à la sauvegarde des intérêts des commerçants disait en conclusion : « La solution la plus radicale est de rendre la totalité de l'espace situé entre le quai et les commerces aux piétons ».

C'est un phénomène bien connu : on fait appel aux meilleurs consultants pour s'empresser de faire le contraire. Pourquoi les préconisations DETENTE n'ont-elles pas été mises en œuvre ?

Par la suite plusieurs projets ont vu le jour puis, ont été rejetés. Depuis plusieurs semaines un comité de réflexion Croisette a été constitué pour proposer une solution. Quelle que soit la future destination de la Croisette, l'enveloppe à prévoir, selon les devis existants, approche les 2 millions d'Euros.

Le Comité de réflexion est confronté à des commerçants et des copropriétaires aux objectifs et intérêts très divergents.

Parmi les copropriétaires six groupes se détachent :

  • Les abstentionnistes représentent le groupe le plus important, il dépasse très nettement la moitié des copropriétaires, ceux-ci se désintéressent complètement de leur immeuble et de la vie de la Marina. Cet abstentionnisme massif empêche de prendre toute décision hors des travaux d'entretien courant, et donc toute restauration de la Croisette.
  • Les adeptes du tout piétonnier sont très largement majoritaires dans la petite moitié restante (selon les sondages effectués par l'AFU), Ces copropriétaires, excédés par la circulation et le stationnement automobiles refuseront forcément de financer tout projet comportant une circulation automobile permanente.

Dans le petit quart qui reste, on peut identifier quatre sous-groupes :

  • Les adeptes de la circulation avec stationnement ;
  • Les adeptes de la circulation avec stationnement minimal ;
  • Ceux qui refusent d'engager un budget aussi important en sus de leurs charges d'immeuble ;
  • Ceux qui veulent une municipalisation de la voie. Dans ce cas il faudrait l'unanimité des votants !. Par contre, si la commune décidait une expropriation, celle-ci ne pourrait avoir lieu que pour une opération déclarée d'utilité publique, donc après enquête publique et dédommagement des expropriés !

MAJORITES - REPARTITION DES VOIX -DEROULEMENT DES VOTES

Toute dépense extraordinaire excédant 5000 € relève de la double majorité : 7500 /10 000éme des voix, plus le vote positif de 9 syndicats secondaires sur 13.

Chaque syndicat secondaire est représenté par un mandataire ad hoc : soit un copropriétaire mandaté par l' A.G, soit le syndic de copropriété, chaque mandataire n'est autorisé à représenter qu' un seul syndicat.

Selon l'article 10 des statuts de l'AFU les membres de l'assemblée générale disposent de 10 000 voix, celles-ci sont réparties entre les syndicataires proportionnellement à l'utilisation des équipements communs à chacun d'eux. L'évaluation de l'utilisation est faite sur la base d'un utilisateur par pièce habitable pour les immeubles à usage d'habitation, et d'un utilisateur par unité commerciale.

Les voix sont donc réparties de la façon suivante :

Pièces d'habitation

Unités commerciales

TOTAL

REPARTITION DES VOIX

Nombre de syndicats secondaires

AMIRAL

736

9

745

1 919

3

BARONNET

662

662

1 705

2

COMMODORE

931

51

982

2 530

4

DUCAL

1 433

60

1 493

3 846

4

TOTAL

3 762

120

3 882

10 000

13







La double majorité AFU revient pour les syndics de copropriété à faire voter les résolutions concernées à l'article 26 de la loi sur la copropriété (au moins les 2/3 du total des voix du syndicat).

Cette catégorie de majorité est totalement inenvisageable sur la Marina. Quid des travaux de réfection de la Croisette ?

LES STATUTS DE L'AFU

Ils sont tout aussi paralysants que la double majorité, ils reposent sur des bases tellement contestables qu'à la moindre action en justice, l'édifice s'écroule comme un château de cartes.

Le rôle du président :

Il a un pouvoir hégémonique : il administre, choisit les entreprises pour faire exécuter les travaux, nomme

ou révoque les employés, stipule et accepte toutes servitudes, passe tous baux, consent tous désistements et mainlevées, prend des hypothèques, exerce toute action judiciaire, arrête les comptes devant être soumis à l'assemblée générale, délègue tout ou partie de ses pouvoirs à telle personne que bon lui semble etc…

Le rôle des mandataires ad' hoc :

Que disent les statuts : « il est ici précisé à cet égard que si l'un des fonds fait l'objet d'une copropriété conformément à la loi du 10 juillet 1965, c'est le syndic, ou le mandataire ad' hoc désigné par l'assemblée générale de chaque syndicat secondaire, qui représente les copropriétaires à l'assemblée générale »

Les modalités de cette représentativité n'existent pas dans les règlements de copropriété. L'assemblée générale de la copropriété se contente d'élire un mandataire sans lui donner de mandat précis. Le mandataire est porteur d'un chèque en blanc !

Le budget de l'AFU est de 431 370 €, c'est une somme qui mériterait quelques regards !

Des solutions

La loi du 21 juin 1865 qui régissait les associations syndicales (ASL, ASA, AFU, AFUL) est abrogée et remplacée par l'ordonnance du 1er juillet 2004 et le décret du 3 mai 2006.

Ces textes reprennent, de manière plus incisive les obligations qui existaient déjà dans la loi de 1865.

Dans une ASL ou une AFU (ces deux types d'associations sont soumis aux mêmes textes), la direction doit être collégiale.

L'ordonnance accordait deux ans (jusqu'à mai 2008) aux associations pour se mettre en conformité avec les textes actuels, sans toutefois, qu'il soit prévu de sanctions. Aucun type de majorité n'est prévu pour l'adoption des statuts modifiés.

Par ailleurs, la loi SRU, en donnant plus de souplesses aux majorités a rendu les copropriétés plus facilement gérables.

Si nous décidions de procéder aux réformes prescrites par le législateur, nous pourrions nous gérer de manière plus démocratique, plus légale, plus sereine ; en adoptant les majorités de la loi SRU, en éliminant les minorités de blocage, nous pourrions enfin envisager le vote d'une réfection de la Croisette.

Eliane Lepoutre

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